Conférence sur l’attachement
Mardi 18 juin à Lausanne (Suisse)

Thérapie Intégrée d’Attachement
(TIA)

La TIA tire ses racines de l’évolution de la TIPA vers une approche enrichie de l’expertise acquise auprès de patients présentant une clinique sous-tendue par un trouble de l’attachement. Leurs besoins particuliers ont conduit à l’élaboration d’une prise en charge ciselée, exclusivement et directement, centrée sur cette dysfonction si spéciale.
Pour cela, la TIA a intégré dans son processus de création, les préceptes psychothérapeutiques énoncés par J. Bowlby qu’elle s’était appliquée à suivre de manière cohérente, non sans avoir été confrontée à la complexité éprouvée dans la conversion de cette théorie en une thérapie non psychanalytique et non cognitive.
Loin de partir d’un modèle médical, la TIA s’appuie donc, sur une base psychopathologique érigeant l’insécurité d’attachement, qui participe grandement, des problématiques personnelles et interpersonnelles vécues par le sujet, au rang de mécanisme explicatif de sa souffrance. Tout autant, la TIA fait de la relation thérapeutique qu’elle aborde à l’aune de l’attachement, sans aucune appréhension transférentielle, un levier thérapeutique à part entière. En plus de l’éclairage instructif qu’il offre dans l’appréhension du trouble, le concept bowlbien a permis l’établissement d’une intervention flexible avec le développement de techniques spécifiques. Le déploiement de celles-ci est assuré grâce au recours à des stratégies adaptées à chaque patient et à chaque situation, selon des lignes directrices préétablies, guidant aidé et aidant, dans ce colloque singulier qui les engage pour un temps précis.
La faisabilité de cette thérapie a été évaluée avec succès, dans le cadre d’une étude menée au C.H. Sainte-Anne (Paris), sur le trouble dépressif persistant. Les résultats définitifs de cette investigation ont été présentés au dernier congrès international de l’AFTIP ayant eu lieu à Paris en mars 2022 ainsi qu’à l’international attachment conference à Lisbonne en juillet 2022.
Une psychopathologie aussi pertinente que celle issue de la théorie de Bowlby, ne suffit pas au bon déroulement d’une psychothérapie car celle-ci suppose également, l’appui sur un cadre opérationnel adapté à l’attachement. Le passage de la TIPA à la TIA s’est effectué avec le développement d’une nouvelle structuration en 5 étapes doublée d’une focalisation sur une relation problématique en lieu et place d’un domaine problématique comme c’est le cas dans la TIPA.
Dans ce sens, trois leviers vont ainsi, jalonner la TIA :
  • La psychopathologie
  • La relation thérapeutique
  • L’intervention
Chaque partie de ce dispositif est conçue en cohérence avec l’ensemble de l’approche qui sera de ce fait, porteuse de sens pour le patient.

La psychopathologie

Face à un stress important, mettant en jeu la relation affective, l’activation du système d’attachement du sujet fait intervenir à travers un processus complexe, plusieurs niveaux, dont les trois principaux sont : les représentations de soi et d’autrui, la régulation émotionnelle d’attachement ainsi que les relations interpersonnelles.

La relation thérapeutique

De manière à rester dans une orientation attachementale, la relation thérapeutique n’est pas appréhendée en TIA à l’aune d’une trajectoire transférentielle.
Dans cette optique, cela consiste en un savoir être s’appuyant sur : Une relation attachementale
Celle-ci réunit d’un côté, le thérapeute dont la capacité d’être opérera en fonction de son style d’attachement et donc sa capacité à proposer pour son patient une base de sécurité. De l’autre côté, nous avons le patient qui aura sa façon d’être en fonction de son style d’attachement.

L’intervention

Les niveaux d’intervention
Désormais, il est exigé des psychothérapies d’être en capacité de s’adapter aux profils différents des patients. Ainsi, la TIA est modulée en fonction du style d’attachement et du niveau d’insécurité d’attachement du patient, tout en tenant compte de la nature de sa relation problématique. Cette modulation donne une répartition en deux niveaux :
Le niveau 1 est prévu pour des patients insécures dont l’insécurité est focalisée sur une relation actuelle. Dans ce modèle, l’intervention vise les interactions d’attachement actuelles et les représentations sont réélaborées selon la notion de la confiance en soi et en la figure d’attachement.
Le niveau 2 concerne des patients insécures dont l’insécurité est fixée dans une relation en lien avec l’enfance. Dans ce ciblage, l’intervention vise bien sûr, les interactions d’attachement actuelles mais, les représentations sont réélaborées selon les notions d’estime de soi et ensuite, de confiance en soi et en la figure d’attachement actuelle. Les pathologies psychiatriques lourdes dont le point commun est représenté par l’intensité de l’insécurité d’attachement, tels que le trouble dépressif persistant (dépression chronique), le trouble personnalité limite et certaines formes d’addiction, sont prises en charge selon cette modalité.
Les indications
L’approche est indiquée dans des troubles en rapport avec un mal être avec soi, un registre où nous retrouvons des pathologies davantage de niveau 2, et/ou un mal à être avec une figure d’attachement, souvent associé au niveau 1.
Ces indications se déclinent selon les types de relations suivants :
  • Relation en cours :
Relation parentale
Relation conjugale (relation amoureuse)
Relation professionnelle
  • Relation interrompue :
Rupture sentimentale
Divorce
Deuil compliqué et pathologique
  • Relation en devenir :
Accès à la parentalité
La structuration
La structuration de la TIA est composée de cinq étapes dont chacune possède un objectif précis s’articulant dans un ensemble de parties cohérent, porteur donc de sens.
A titre indicatif, la durée globale de la thérapie est estimée, selon le style d’attachement, entre 16 (préoccupé) et 20 (détaché) séances pour le niveau 1 et entre 20 et 24 séances, voire davantage (craintif) pour le niveau 2. Plus le degré d’insécurité est élevé plus il devient nécessaire d’augmenter la durée, encore une manière de coller au profil du patient.
  • Évaluation : à cette étape, le premier défi à relever par le thérapeute concerne l’installation de la relation thérapeutique qui conditionne la suite de la thérapie. L’évaluation concernera le repérage d’une pathologie psychiatrique dont les troubles neuro-développementaux, l’identification de la relation problématique ainsi que l’investigation de l’histoire de l’attachement.
  • Engagement : ici, le thérapeute s’attaque à un autre défi consistant à forger chez son patient une bonne alliance de travail.
  • Remaniement : cette partie est au cœur du changement visant l’attachement du sujet. A ce niveau, deux techniques spécifiques centrales de la TIA sont à mettre en œuvre de manière chronologique et de façon complémentaire. Il s’agit dans un premier temps, de l’Analyse de la Dysrégulation Émotionnelle Stratégique (ADES) et dans un second temps, de la Réélaboration Représentationnelle (RR°). A la première revient un travail sur les stratégies d’attachement secondaires et à la seconde un travail sur les représentions de soi et de l’autre.
  • Investissement : ce n’est qu’à ce stade qu’on s’attaquera à la résolution de la problématique relationnelle. Ce but est atteint par le truchement du Développement de Compétences Interactionnelles d’Attachement (DCIA).
  • Terminaison : la fin de la thérapie est abordée pour clôturer ce travail qui aura visé un triple objectif ; la sécurisation de l’attachement de même que la résolution de la problématique relationnelle ainsi que l’amendement d’une symptomatologie psychiatrique, le cas échéant.

Le principe

L’idée est de proposer une thérapie élaborative, limitée dans le temps mais, dotée d’outils suffisamment spécifiques et adaptés à la singularité du patient, de manière à permettre malgré tout, un travail en profondeur de sa problématique attachementale, sans l’engager pour autant, dans une prise en charge longue qui de surcroit, ne saurait être un gage d’efficacité.
En tenant compte de certains aspects repérés dans l’histoire du sujet, cette modélisation de la TIA, consistant en une intervention ancrée dans l’ici et maintenant, rompt ipso facto, avec la dichotomie classique opposant présent et passé.

La validation

Après l’étude pilote sur le trouble dépressif persistant nous avons lancé deux études randomisées et multi-centriques :
1- La TIA dans l’épisode dépressif caractérisé (Paris, Tunis et Casablanca)
2- Thérapie Intégrée dans le Mésusage du Cannabis chez l’Adolescent (TIMCA), incluant EM, TCC, TIA. (CH. Sainte-Anne et Hôpital Paul-Brousse)