La thérapie interpersonnelle
basée sur l’attachement
(TIPA)
La TIPA est un modèle dont le développement a été réalisé sur la base d’une intégration modélisée, de la théorie de l’attachement à la thérapie interpersonnelle classique, en tenant compte des insuffisances de cette dernière approche, signalées par de nombreux experts.
De manière à bien suivre le processus ayant présidé à l’élaboration de ce modèle, une brève présentation des éléments issus de la théorie de l’attachement s’impose.
Néanmoins, auparavant le lecteur est prié de cliquer sur le lien suivant : thérapie interpersonnelle (TIP)
de manière à se familiariser d’abord avec la thérapie interpersonnelle classique et ainsi, saisir le sens de l’évolution vers la thérapie interpersonnelle basée sur l’attachement que nous vous présentons ici.
I- La théorie de l’attachement
Selon Bowlby (1982), les êtres humains viennent au monde avec un système psychobiologique inné qui les motive dans leurs recherches d’une proximité avec des personnes soutenantes qui prennent soin d’eux (figures d’attachement) en cas de besoin. La première fonction de ce système d’attachement est la régulation des sentiments de détresse.
Bowlby (1973) décrit des différences individuelles importantes au niveau de ce processus. Les interactions avec des figures d’attachement disponibles, facilitent le fonctionnement optimal du système et promeuvent un sentiment de sécurité qui rend possible l’exploration de l’environnement. Ce sentiment de sécurité s’enracine dans des représentations mentales positives de soi et des autres, que Bowlby nomme « modèles internes opérants » (MIO).
Mikulincer et Shaver (2003) avancent l’explication suivante au sujet de l’activation du système d’attachement : quand le sujet a le sentiment que sa figure d’attachement est disponible et susceptible de répondre à ses besoins, le sentiment de sa sécurité d’attachement s’en trouve renforcé, facilitant ainsi l’usage de stratégies de régulation émotionnelle constructives qui ont pour objectif de supprimer le stress lié à la menace.
À l’inverse, la perception de l’indisponibilité de la figure d’attachement conduit à un sentiment d’insécurité. Cet état provoque chez le sujet des tentatives itératives et énergiques pour atteindre la proximité, le soutien et l’amour de la personne visée. Ces tentatives sont appelées des stratégies d’attachement « d’hyper-activation ».
D’un autre côté, si une personne a appris que le fait de s’appuyer sur les figures d’attachement n’est pas source de sûreté pour faire face aux menaces, sa conduite consistera à minimiser ces menaces, et à inhiber les inquiétudes et les émotions négatives afférentes. Ces stratégies d’attachement sont des « désactivations ».
(Les pionniers de l’attachement)
II- La thérapie interpersonnelle basée sur l’attachement
De façon pratique, nous pouvons décliner le modèle TIPA de la manière suivante avec un cadre
thérapeutique précis :
La relation thérapeutique
Elle est principalement basée sur la mise en place d’une base de sécurité par un thérapeute accessible, réactif et fiable. Cela implique qu’il fasse preuve d’empathie et qu’il soit doté d’une bonne fonction réflexive.
Un principe
La TIPA postule l’existence d’une relation bidirectionnelle entre la dépression et les dysfonctions interpersonnelles, et cherche à rompre ce cercle vicieux auto-entretenu.
Un fondement théorique
La TIPA est née sur la base de la théorie de l’attachement telle qu’elle a été conçue par Bowlby et prolongée par des travaux récents préconisant son adaptation auprès de l’adulte. Ce concept met en lien les relations précoces avec les relations interpersonnelles actuelles d’un individu en postulant que ses dysfonctions interpersonnelles sont sous-tendues par une désorganisation de son système d’attachement dont l’activation s’opère à l’occasion d’un événement de vie stressant.
Cette notion de désorganisation du système d’attachement a été revisitée par le Dr H. RAHIOUI qui la conçoit d’une manière où existe un continuum entre trois niveaux définis à l’aune du degré de l’insécurité d’attachement du sujet : Il les a appelés les niveaux des trois D :
– Niveau 1 : Dysfonction interpersonnelle.
– Niveau 2 : Dysrégulation émotionnelle interpersonnelle.
– Niveau 3 : Déstructuration représentationnelle.
Des domaines problématiques
La TIPA s’intéresse tout particulièrement à trois domaines fréquemment associés à une décompensation dépressive :
– Les conflits interpersonnels : en général, ils sont la conséquence d’attentes non réciproques et/ou irréalistes.
– Le deuil : le terme de deuil ne s’applique ici que dans le cas du décès d’une personne investie affectivement et ne s’entend pas dans un sens symbolique élargi.
– Les transitions de rôle : ces moments se rapportent aux changements de statut qui surviennent dans la vie de tout un chacun et qui requièrent un ajustement qui peut parfois faire défaut chez certaines personnes confrontées à des situations particulières jugées négatives ou positives, telles que : licenciement, départ à la retraite, promotion professionnelle, divorce, rupture sentimentale ou naissance d’un enfant.
Contrairement à la TIP classique, notre modèle basé sur l’attachement permet, grâce à un thérapeute rompu à cette pratique, de prendre en charge des patients souffrant de dépression chronique ou de troubles de la personnalité et ce, sans l’existence obligatoire d’un domaine problématique.
Des techniques spécifiques
De manière à atteindre les objectifs fixés pour chaque domaine problématique, le thérapeute fera appel à des techniques – dont certaines sont propres à la TIPA – qui découlent de l’identification du niveau d’insécurité d’attachement.
Pour comprendre la place de chacune d’entre elles, nous les avons sériées en trois parties :
– techniques d’exploration/clarification ;
– techniques visant l’attachement : restructuration représentationnelle, régulation émotionnelle interpersonnelle et modulation interactionnelle ;
– techniques visant les interactions : jeux de rôle, développement de réseau de soutien social, pratique dans la vie réelle.
La TIPA en fonction des niveaux de désorganisation d’attachement
Une durée de prise en charge
L’évolution de la TIP classique vers une TIP basée sur l’attachement justifie l’augmentation du nombre de séances pour passer ainsi de 12-16 séances à 16-20 séances, de manière à tenir compte du travail supplémentaire visant les insécurités d’attachement, voire davantage en cas de désorganisation d’attachement importante. Cette variable d’espace-temps est annoncée dès le début de la thérapie après les évaluations nécessaires, afin d’en rendre l’approche véritablement dynamique.
Une structuration
– Une phase initiale : consacrée à l’évaluation, cette phase portera sur l’analyse symptomatique pour poser le diagnostic de dépression, sur l’inventaire interpersonnel pour identifier le niveau de désorganisation d’attachement ainsi que sur le domaine problématique, qui sera le focus thérapeutique. Après une explication apportée au patient selon le modèle biopsychosocial, l’établissement d’un contrat engageant thérapeute et sujet conclut cette phase d’engagement.
– Une phase intermédiaire : c’est la phase active qui va se baser sur les données glanées tout au long de la phase précédente. Deux séquences vont scander cette phase ; la perlaboration entre dépression et dysfonctions interpersonnelles et la mise en place de stratégies thérapeutiques adaptées au domaine problématique identifié.
– Une phase finale : c’est le stade où la séparation est activement travaillée pour éviter chez le patient l’émergence d’un sentiment d’abandon et de rupture. Elle sera également l’occasion d’aborder le sujet dans un mouvement de transition de rôle en le faisant passer d’une position de malade à une position de sujet bien portant.
– Une phase de maintien : la mise en place de quelques séances plus ou moins espacées dans le temps est nécessaire dès lors que l’on identifie chez le patient un terrain ou le trouble dépressif est marqué par la récurrence.
III- Qui peut en bénéficier ?
A l’instar des autres psychothérapies, la TIPA ne prétend pas être efficace pour tous types de pathologies. En effet, son intérêt réside surtout, dans le fait qu’elle se focalise de manière précise et spécifique sur les troubles mettant en jeu les relations interpersonnelles marquées par une dysfonction qui opère souvent à l’insu du patient.
Aussi, s’adresse-elle à des personnes présentant des difficultés interpersonnelles en lien avec un deuil pathologique, un conflit interpersonnel ou une transition de rôle (autrement dit, un changement de statut social, tels la naissance d’un enfant, un licenciement ou une dépression du post-partum), associées ou non à des pathologies psychiatriques, classiquement rencontrées avec ces troubles d’attachement.
Globalement et de façon schématique, nous envisageons les indications de la TIPA selon deux registres qui peuvent être isolés ou combinés :
1) des domaines problématiques :
– le conflit interpersonnel / contexte de souffrance conjugale
– le deuil pathologique
– les transitions de rôle
2) des pathologies psychiatriques :
– la dépression
– la dysthymie
– le trouble bipolaire
– le trouble personnalité limite
– les addictions
– le TDA/H et le haut potentiel
– le burn-out
Il est également possible de prendre en charge des patients souffrant de dépression chronique ou de troubles de la personnalité, ou encore d’aider des personnes présentant des difficultés relationnelles et ce, sans l’existence obligatoire d’un domaine problématique ou de dépression.
Si vous êtes un patient et que vous ne savez pas si vous pourriez bénéficier de cette thérapie, rapprochez-vous du
centre de thérapie interpersonnelle pour une aide et éventuellement une évaluation qui ne vous engage pas à un suivi psychothérapeutique.